Adieu paysan ! — Aumônerie des hôpitaux de Pau

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Adieu paysan !

 

 

Comme tout bon béarnais qui se respecte, Pierre n’enlevait son béret que devant Dieu. Mais quel Dieu occupait ses pensées et ses prières ?

Dieu créateur était le plus facile à reconnaître pour un enfant de l’ancien monde, familier des mystères de la nature et de sa beauté. Dieu était maître du temps et de l’espace. L’angélus quotidien et les croix des carrefours apposaient  sa signature dans le paysage.

La loi de ce Dieu, résumée dans les dix commandements, étayait les consciences et empêchait les débordements néfastes à la vie en société. 

Puis, quand la terre ne répondait plus aux attentes des hommes, quand les éléments se déchaînaient, on se souvenait qu’une vie bienheureuse nous attendait, après la mort, dans le paradis. Tel était le Dieu de l’enfance de Pierre.

Mais, dans les années 50 de l’autre siècle, les hommes ne voulurent plus attendre l’au-delà pour être heureux et demandèrent à la terre, grâce à la machine et à la chimie, de se soumettre à leurs désirs. Pierre devint alors agriculteur sans cesser, cependant, d’être paysan dans l’âme. Il n’abandonna pas le Dieu créateur mais en ouvrant l’Evangile, il se souvint que la vie éternelle, selon Jésus, commençait ici bas. Il s’engagea avec la JAC (la jeunesse agricole catholique) à rendre le monde plus humain et plus juste. Ceci l’amena à prendre de nombreuses responsabilités dont celle de maire de sa commune pendant 37 ans.

Grisé  par ses succès l’homme des champs en a conclu, un peu vite, que le Dieu créateur, le Dieu du permis et du défendu, celui du paradis n’étaient plus utiles à notre société marchande. Mais comme l’homme a besoin d’un Dieu, sans se faire prier, il prit sa place. Aujourd’hui, il déchante car il a créé, lui-même, les limites qui l’enferment et qui obturent son horizon. La crise et les secousses actuelles révèlent le mal-être des campagnes.

Ce mal a des racines profondes. L’être humain a voulu singer ce Dieu tout puissant auquel il croyait en oubliant que le Dieu de Jésus Christ est avant tout Père. Un père qui a la faiblesse de nous aimer à sa mesure c’est-à-dire infiniment, jusqu’au pardon.

Pierre savait que la solution au désespoir de l’homme actuel, paysan ou citadin, n’est pas seulement économique, sociale ou politique. Elle est avant tout religieuse. Elle est dans une alliance renouvelée entre les fils que nous sommes et ce Père à qui nous devons tout. Elle est dans une vie à partager entre frères retrouvés. Adieu, paysan !

 

Jean Casanave