LA SOLITUDE : AMIE OU ENNEMIE? avec Catherine MAZEREAU — Aumônerie des hôpitaux de Pau

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LA SOLITUDE : AMIE OU ENNEMIE? avec Catherine MAZEREAU

                                   

 

            La question parait toute simple au départ : sauf en cas de vocation particulière, vivre isolé apparait plutôt comme une épreuve subie. La formation du "moi" - la conscience d'être - qui autorise le sentiment de solitude, est paradoxalement le résultat d'une communication sociale qui commence avec la relation maternelle et l'apprentissage de la parole. Plus tard, les moments de solitude sont perçus comme des parenthèses au cours de la vie familiale ou professionnelle. La vie en société est une alternance de moments de solitude et de périodes de partage.

 

            L'hospitalisation est l'un de ces temps où le sujet, inactif par force, privé d'initiative,  inquiet de son avenir, s'interroge sur le déroulement de sa vie. Moment totalement négatif? ou occasion d'une recherche, voire d'un ressourcement? Telle est la question posée ce mardi à l'équipe d'aumônerie par Catherine Mazereau, psychologue et fidèle animatrice de ces rencontres.

 

            Quand un visiteur ou une visiteuse pénètre dans une chambre d'hôpital, c'est avec l'espoir de donner l'occasion à ce patient d'établir une communication, d'entrer en empathie et d'être soutenu dans sa recherche. Cet instant peut ne durer que quelques minutes, et pourtant être vécu comme un temps fort, un signal, une chance. Plusieurs interventions ont témoigné modestement de la reconnaissance de personnes visitées. Il y a de belles rencontres avec des malades qui pourtant au départ n'avaient rien demandé.

 

            Comme une harmonie flotte autour des notes d'une musique, une réalité informulée s'échange au-delà des paroles exprimées : "C'est en parlant à quelqu'un que j'ai fini par prendre conscience de quelque chose de moi que j'ai été amenée à formuler". Rien que la vue du badge identifiant le visiteur réveille chez les personnes visitées des représentations qui peuvent déclencher des comportements divers. Le refus n'est pas nécessairement le signe d'un échec, il peut mettre en marche des souvenirs, des états d'âme. On ouvre des  des pistes, on fait revivre quelque chose de soi : "J'ai été enfant de chœur. Mes parents me disaient…". La rencontre est un moyen d'alimenter la réflexion du patient croisé ce jour-là.

 

            Grande question donc que la solitude, moment vide ou moment riche de vie? Et d'évoquer une parole de Jung : "La solitude ne vient pas de l'absence de gens autour de nous, mais de notre incapacité à communiquer des choses qui nous semblent importantes, et notamment nos émotions." Il arrive que cela s'éprouve même au sein d'un couple.

 

            Nous ne sommes pas égaux devant les situations de solitude qui  s'imposent à nous. L'Evangile rapporte que le Christ, à des moments importants, s'est retiré "seul" pour prier. Alors, la "richesse" d'une solitude dépend de ce qui l'a nourrie? Elle peut être une communication intérieure, avec Dieu dans la prière, ou avec nos disparus, avec ceux près de qui nous vivons, ou que nous avons croisés à telle ou telle occasion. Il s'agit alors de respecter des "temps de recueillement" où nous pouvons penser à la "communion des saints".

 

            La question se pose, disent les psychologues, dès les expérience archaïques de la petite enfance, par la manière dont le bébé est touché et regardé. Déjà là, avec l'éveil du "moi", grandit la capacité de "vivre sa solitude". Quand le sentiment de solitude se développe, il importe de se demander comment on en est arrivé là, quelle est ma participation personnelle dans la mise en place de cette solitude? Le fait de pouvoir se raconter et d'être écouté, en tête à tête, ou au sein d'une structure à taille humaine, contribue à l'effacement de l'aspect douloureux du sentiment de solitude. Dans le monde actuel urbanisé et violent, caractérisé par un individualisme perdu dans le collectif, la vie associative représente peut-être un moyen de restituer aux adhérents une personnalité plus équilibrée.

 

            La solitude alors n'est plus un isolement, mais une occasion d'approfondir en esprit et en affectivité le sens de son enracinement à son environnement, et peut-être de trouver là l'origine d'un engagement vers un rôle social renouvelé, par exemple… la visite de personnes seules!

            "Apprendre à être à la fois seul et relié, tel semble donc le paradoxe de la solitude bien vécue", conclut madame Mazereau.

 

Robert LATAPIE : bénévole de L'Equipe  de l'Aumônerie