Souhait pour Noël et pour l’an neuf. — Aumônerie des hôpitaux de Pau

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Souhait pour Noël et pour l’an neuf.

 

Ceux qui nous voient chaque année entrer dans nos églises la veille ou le jour de Noël et écouter pour la énième fois des paroles de paix, de joie et de salut doivent se demander si nous ne sommes pas totalement inconscients ou infantilisés.

« Comment peuvent-il y croire encore ? » se demandent-ils, alors que depuis plus de 2000 ans rien n’a changé sur la terre. Les bombes pleuvent sur la Syrie, l’ONU n’en finit pas de voter des résolutions inefficaces, les camions fous fauchent des vies dans les marchés de Noël, des femmes sont enlevées et violées, des enfants assassinés… Comment peuvent-il croire encore en un Sauveur ?

Nous pourrions leur rétorquer : « Pourquoi ceux qui n’y croient pas vont-ils quand même illuminer un sapin, faire un cadeau à leurs proches et dans quelques jours leur souhaiter une bonne année alors que la crise réduit les budgets, que le cancer n’est pas vaincu, que les familles éclatent et que les jeunes désespèrent et se radicalisent. Pourquoi croient-ils qu’il faille encore espérer un lendemain souriant ?

Pourquoi lorsqu’un petit enfant paraît dans une famille, voyons-nous revenir du fond des âges, ces attitudes étranges des jeunes parents en extase devant la dernière merveille du monde et ces contorsions des grands-parents qui se prêtent à toutes les clowneries pour obtenir un babil du bébé ? Pourquoi tout cela alors que cette petite vie est si fragile et que tant de dangers la guettent ?

 

Pourquoi cet acharnement à espérer un avenir malgré et contre tout, que nous soyons croyants ou non?

 

Parce que l’annonce d’un salut, de la venue d’un Sauveur correspond à un désir qui est tapi au plus profond de notre être, dans ce qu’on appelle notre âme.

Notre culture nous a habitués à penser les choses en deux parties : le blanc et le noir ; le feu et l’eau ; le corps et l’esprit ou l’âme, car on a confondu souvent les deux par paresse intellectuelle. Notre corps est le condensé de l’univers dont il tire sa substance. Il est ainsi le siège de toutes les sensations, le réceptacle de toutes nos relations avec le cosmos et les autres êtres vivants, avec leurs pesanteurs douloureuses et leurs beautés enivrantes. L’esprit analyse et organise cette communion ; il échafaude en outre un autre monde, le royaume des idées, qui peut transformer notre monde mais aussi le détériorer et l’anéantir. Corps et esprit peuvent s’opposer, se détester comme ils peuvent se compléter et s’harmoniser. Mais ce qui fait l’unité de notre être et ce qui nous fait unique, c’est notre âme.

Ce mot semble sorti de la naphtaline. Il fait allusion à ces « bonnes âmes » qui s’émeuvent pour un rien mais restent comme en suspens, inactives. Il rappelle, pour certains, le vocabulaire désuet du « Je n’ai qu’une âme qu’il faut sauver » comme si elle était seule en cause. Les « beaux esprits » ont eu beau jeu de ridiculiser, hier, les « bonnes âmes ». Mais ce sont les mêmes qui, aujourd’hui, renvoient le corps à sa matière brute pour la manipuler sans précaution. Et puis, on a tant à faire au quotidien pour assurer la santé du corps et la qualité de l’esprit que l’âme peut rester enfermée dans le placard des souvenirs !

Réveillons-nous, comme l’ont fait les bergers en pleine nuit ! Réveillons notre âme. Elle est l’artisan de notre unité et de notre unicité comme le rappelle F. Cheng dans ses  sept admirables lettres sur l’âme. C’est elle aussi qui maintient, sous l’accumulation des ruines matérielles et spirituelles, ce désir fou de salut qui nous relève sans relâche de nos chutes et nous soulève vers un « on ne sait quoi ». Et, si c’était cela, retrouver « une âme d’enfant » ? Non pas un esprit puéril ou infantile qui croit tout ce qu’on lui raconte. Mais cette capacité de se confier sans réserve à la fidèle constance de Celui qui donne la Vie par-delà toutes les morts.

Oui, retrouvons notre âme, cette haleine divine tout droit venue du Souffle primordial. Souvent  comprimée au plus profond de notre intimité, elle ne demande qu’à faire vivre en toute amplitude nos trois composantes (corps, esprit et âme) et à nous rendre ainsi la ressemblance de Celui qui, lui aussi, est trois en Un.

 

« Bénis le Seigneur ô mon âme ! » psaume 103

       

        Jean Casanave